1968... après que le groupe New Yardbirds ait effectué une tournée en Scandinavie, Keith Moon lance une vanne ou peut être même une suggestion quant au nom du groupe qui devenait pesant pour ses membres :
"« Ce groupe va couler comme un dirigeable de plomb. »" Et ce fut fait, le groupe nommé New Yardbirds, fut baptisé ainsi Led Zeppelin ! Et ce nom fit des ravages dans l’histoire du rock La Baronne Von Zeppelin s’indigna qu’une bande de chevelus « iconoclastes » (dans le texte, Messieurs dames !) puissent user de ce préstigieux nom pour le vautrer dans la fange du rock !!! Première victime du groupe ! Qui se voit imposé de finir sa tournée scandinave sous leur ancienne appellation ?.... Bon, y en pas beaucoup qui suivent là !!! Qui a dit Lorie ? On ne rit pas !
Quant à la deuxième, il s’agit du groupe californien Iron Butterfly... qui avait gentiment accepté de mettre en première partie de leur concert Led Zeppelin... Déjà, les premiers pas, le premier concert, juste une première partie... la seule et l’unique !!! ... lorsque le dirigeable débute son concert, c’est une tornade, un typhon... des sons jamais encore entendu jusque là déferlent dans la salle... le public n’en revient pas et en redemande... Des rifs d’enfer « Communication Breakdown » avec la voix de Robert Plant (le chanteur, notez) au paroxysme du l’imploration hurle sur une guitare prête à exploser... j’ai bien dit hurle car, Plant fait partie de cette génération de Blues Yeller, littéralement, hurleur de blues qui emprunte au blues classiques, leurs thèmes. A certains moments on en est à de la musique presque expérimentale... lorsque Jimmy Page (le guitariste, prenez des notes, je ne répéterais pas) pendant le morceau « Dazed And Confused » sort un archet de violoncelle... Que peut faire Iron Butterfly ? Le papillon d’acier a été éclipsé par le dirigeable ! D’autant plus que surviennent des pannes à répétitions.... et le groupe s’enlise dans des impros sans inventivités... ce fût terrible... Ce premier concert du Zeppelin s’appuie en fait sur la première galette du groupe elle-même issue de tout ce sur quoi a travaillé Jimmy Page à l’époque des Yardbirds. La plupart des morceaux dont le fameux « Dazed And Confused » ont été rôdés sur les scènes précédentes. Des reprises de Willie Dixon : « I Can’t Quit You Babe » ou « You Shook Me ».... Des morceaux qui naviguent entre un spleen électrique tel que « How Many More Times » et le côté fleur bleu/cœur d’artichaut du chanteur « Good Times, Bad Times »... bref, une tendre sauvagerie !!! Et dans cet univers de brutes, s’insère des choses quasi inconcevables, à l’époque pour un groupe de rock (hard rock inside !)... de l’acoustique ! Si ! Si ! D’abord le traditionnelle « Babe, I’m Gonna Leave You » (déjà connu par l’interprétation de Joan Baez). Bon, là, il vaut mieux oublier ce faisait la douce de ce morceaux ! Sous la voix de Robert Plant et la guitare de Jimmy Page, le morceau prend tout son aspect pathétique... et replonge l’auditeur dans les entrailles de la souffrance de la séparation... Emouvant ! Si ! Si ! Et on en est qu’au premier album ! Le numéro II est du même acabit ! On balance entre Fleur bleue et sauvagerie quasi incontrôlée ! avec en point culminant la reprise de Willie Dixon (eh oui ! encore lui !) « Bring It On Home » qui impose un pathos digne d’un Baudelaire :
« Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle
Sur l’esprit gémissant en proie aux longs ennuis,
Et que de l’horizon embrassant tout le cercle
II nous verse un jour noir plus triste que les nuits ;
...
Des cloches tout à coup sautent avec furie
Et lancent vers le ciel un affreux hurlement,
...
- Et de longs corbillards, sans tambours ni musique,
Défilent lentement dans mon âme ; l’Espoir,
Vaincu, pleure, et l’Angoisse atroce, despotique,
Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir. »
Ecoutez le morceau et vous comprendrez ! Une basse lourde et grasse cisaillé d’un harmonica et d’une voix étouffée ! Jusqu’au déchaînement de la guitare sur un riff qui déchire le ventre et les oreilles...
Le troisième album diffère un peu et propose un set acoustique (aujourd’hui, on dit unplugged !) qui surprendra plus d’un fan du groupe ! Certains iront même jusqu’à le bouder ! Toute la deuxième face (du temps des vinyles ! je sais, ça ne nous rajeunit pas !) est basée sur de l’acoustique uniquement ! Alors que la première partie, par contre, reste peu innovante, hormis le blues « Since I’ve Been Lovin’ You » qui impose au genre le style Zeppelinien ! Je dirais que le disque a été sauvé par la face 2... mais cela n’engage que moi ! bien sûr !
Le quatrième album, le plus connu, le plus réputé & peut être le plus abouti... où l’influence de Robert Plant prend sa place par l’évolution du texte ! La symbolique zeppelinienne apparaît à partir de cet album. Quatre signes cabalistiques (1) remplacent le nom de chaque membre du groupe. On y voit le goût prononcé de Jimmy Page pour tout ce qui concerne l’ésotérisme. Si on doit citer un morceau du groupe, la plupart du temps, c’est « Stairway To Heaven » qui revient. Un peu le classique de la discographie zeppelinienne. Morceau construit en escalier qui finit sur l’apothéose d’une envolée lyrique et retombe dans la douceur la plus extrême. Je n’oublierai pas de citer le sauvage et débridé « Rock And Roll »....
Le cinquième album « House Of The Holy » offre une exploration et une innovation musicales toujours en plein essor. Le synthétiseur prend une place plus importante et si le rock zeppelinien est toujours aussi emporté, énergique, il s’affine dans son instrumentation. Il suffit pour cela d’écouter « The Rain Song » pour s’en convaincre ou « No Quarter ».
Ensuite s’enchaîne « Presence », « Physical Graffiti » (l’une des pochette de disque les plus cher de l’histoire du rock avec celle des Stones « Sticky Fingers » !) albums qui déclament un renouveau du rock métallique. Des morceaux extraordinaires comme « Achille’s Last Stand » ou « Tea For One » où le pathos étouffe l’auditeur jusqu’à la quasi asphyxie... sans oublier le titre d’anthologie : « Kasmir » un morceau de toute beauté alliant le métal zeppelinien et l’orient subtil !
Suit alors le live tant attendu des fans... celui-ci prendra le nom du titre ouvrant l’album précédent : « The Song Remains The Same ». Live un peu surprenant dans lequel on ne retrouve pas la puissance et la folie du groupe. On aurait presque envie de dire qu’il a été bâclé ! À l’exception du solo de batterie qui frise le génie... et j’ai bien pesé mes mots !
Un temps avant le dernier album du groupe, trois ans, c’est long, avec un titre qui présage la suite... ? « In Through The Out Door ». Des titres tous plus étonnants les uns que les autres, voire déroutant tant l’usage du synthé et d’instruments inhabituels au dirigeables sont présents. Déjà, se laisser surprendre par « In The Evening » « Carouselambra », se laisser envoûter même !
Hélas quelques temps après, John Bonham le batteur du groupe se tue d’une surdose d’alcool et le groupe met fin à sa carrière cette même année. Seul un album posthume sortira en 1982 : « Coda » fin de la partition... le reste n’est plus que commerce et les carrières solos voir même duos (Page/Plant) ne seront pas aussi brillante que celle du dirigeable en plomb : Led Zeppelin.